René Morax

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*  11.5.1873 Morges VD, † 3.1.1963 Morges VD. Frère de →Jean M., peintre, qui collabore avec lui comme décorateur et costumier (1901-39).

De 1901 à 1903, M. écrit, réalise au théâtre et publie trois drames, une pièce historique, plusieurs comédies, dont le succès sur les scènes vaudoises, romandes puis suisses, le laisse pour longtemps sans rival. Avec La Nuit des quatre-temps, créée au →Casino de Morges (29.11.1901), il conçoit un drame en quatre actes solidement construit et efficace qui présente des caractères montagnards sur fond de terrifiante légende alpestre; la pièce est immédia­tement reprise par les meilleurs amateurs lausannois et genevois. Dans La Dîme, il rappelle à Mézières une rébellion régionale datant de plus d’un siècle et qui finit bien; il intercale des chœurs entre les actes, et la création par des amateurs locaux sous la direction du directeur du Théâtre de Lausanne soulève la ferveur populaire (15.4.1903). Il obtient aussi un succès d’estime pour Claude de Siviriez, drame sur l’irruption de la Réforme à Orbe au XVIe siècle créé par la troupe du Théâtre de Lausanne (26.2.1903). Cinq autres de ses pièces sont encore réalisées de 1902 à 1905, dont on retient surtout Les Quatre Doigts et le Pouce, ou la Main criminelle, inénarrable parodie d’une représentation d’amateurs vus des coulisses, créée à Morges par l’équipe des machinistes du Casino de Morges (29.4.1902) et régulièrement reprise depuis lors. À 30 ans, il se voit confier l’écriture du livret de la →Fête des Vignerons de Vevey (4.8.1905): il en bouleverse l’ordre, commençant par l’hiver, saison la plus calme des travaux de la vigne et pour lui la moins spectaculaire, pour terminer par l’automne qui cumule les récoltes. Associé à →Gustave Doret pour la musique, il en prépare aussi la mise en scène. Grâce aux appuis gagnés avec La Dîme, il fait ensuite bâtir à Mézières le →Théâtre du Jorat, tout en bois, où il défend alors ses options théâtrales populaires, coopératives et de création. Toutes les pièces qu’il y donne comprennent des chœurs, et il s’appuie dès lors le plus souvent sur Doret pour la musique, comme sur →Jaques Bonarel ou Paul Tapie pour la mise en scène. La générale d’Henriette inaugure le lieu (7.5.1908); histoire d’une fille d’alcoolique séduite et abandonnée, ce drame naturaliste régional fâche le public, qui est en revanche conquis par celle d’Aliénor comtesse de Romont devenue troubadour par amour (16.5.1910); triomphe public, Aliénor est reprise en plusieurs occasions au Jorat, par des professionnels au Théâtre de Lausanne, au →Grand Théâtre de Genève et par de nombreuses équipes d’amateurs. Après une seconde version de La Nuit des quatre-temps étendue aux dimensions de la scène du Jorat (8.6.1912), l’auteur donne à Mézières un Tell téméraire mais bon soldat (28.5.1914), auquel va répondre le Guillaume le Fou individualiste de →Fernand Chavannes, critique vis-à-vis de l’écriture unanimiste. Durant la guerre le Théâtre du Jorat reste fermé et M. explore d’autres voies, notamment le théâtre pour marionnettes, créant trois de ses pièces à Zurich, en été 1918, avec l’appui du mécène Werner Reinhart, domaine qu’il développe aussi à Lausanne (1925-27). La paix revenue, il offre au Jorat Le Roi David, drame biblique de première grandeur (11.6.1921) avec une musique d’→Arthur Honegger et la collaboration d’Alexandre Cingria pour les décors; simplifié en oratorio l’année suivante, l’ouvrage est repris fréquemment. Réunissant la même équipe, il donne aussi un autre drame bib­lique, Judith, (13.6.1925), après avoir fait réaliser son Davel à l’occasion du bicentenaire de l’exécution du héros vaudois (19.5.1923). À l’Opéra-Comique de Paris, se joue alors La Tisseuse d’orties qu’il avait écrite vingt ans plus tôt sur une musique de Doret (19.11.1926). Après la reprise d’Aliénor en 1926, puis sa traduction du Roméo et Juliette de Shakespeare mis en musique par Frank Martin (1.6.1929), il collabore à nouveau au Jorat avec Honegger, et avec →Gaston Faravel pour le décor, réalisant La Belle de Moudon, entraînante satire des mœurs régionales confrontées à une intrusion artistique (30.5.1931). Après La Terre et l’Eau, drame de l’exclusion (10.6.1933) et la reprise de Tell (1935), il crée La Servante d’Évolène (29.5.1937), légende valaisanne qui s’achève par une victoire de l’amour sur la mort et sur les différences sociales. Durant cette période, le Théâtre Municipal de Lausanne reprend plusieurs de ses pièces et crée L’Esprit du Mal (6.2.1936), puis Catherine de Sienne, mystère mystique en un acte (14.11.1940). À Mézières, il crée encore sur une musique d’Honegger Charles le Téméraire (27.5.1944), puis sur celle d’→André-François Marescotti La Lampe d’argile, située à Aventicum au IIIe siècle (31.5.1947). Ses dernière collaborations d’importance au théâtre sont pour Job le vigneron, mystère en trois actes créé au Casino-Théâtre de Sierre par les Compagnons des Arts, avec une musique de Marescotti (24.10.1953) et la reprise mémorable par les →Faux-Nez de →Charles Apothéloz des Quatre Doigts et le Pouce (1955/56). Il a fait don de son impressionnante collection de poupées au Musée Forel, à Morges.

Bibliographie

  • Jean Nicollier, R. M. poète de la scène, Bienne, Panorama, 1958.
  • Stéphane Audel, Le Théâtre du Jorat et R. M., Lausanne, Rencontre, 1963.
  • Pierre Meylan, R. M. et son temps, Morges, Cervin, 1973.
  • Théâtre du Jorat. 75 ans d’images, Denges-Lausanne, Verseau, 1983.
  • Yvan Schwab, R. M. Un théâtre pour le peuple, Morges, Musée Alexis Forel, 2003.

Sources

  • Bibliothèque littéraire romande, Morges.


Auteur: Joël Aguet



Source:

Aguet, Joël: René Morax, in: Kotte, Andreas (Ed.): Dictionnaire du théâtre en Suisse, Chronos Verlag Zurich 2005, vol. 2, p. 1273–1274.